La
légende du Chemin de Saint Jacques
Cette
légende repose sur une particularité géographique d'alors :
Lorsque
la marée montait (avant la construction du barrage d'Arzal), il se
formait un mascaret et, si le vent soufflait vers l’amont de la rivière,
c’est-à-dire vers l’Est, il poussait devant lui un rouleau d’écume.
Voici
comment Monsieur De Barmon, en 1861, nous conte cette légende :
"A
une date que le Cartulaire de l'Abbaye de Redon ne précise pas, mais dans
la saison qui amène le retour des oiseaux vers nos régions, "à la
St-Grégoire où les coucous passent la Loire," des jeunes filles
lavaient du linge près du pont de Rieux, agenouillées sur des gradins en
bois avancés dans la rivière. Ces filles aux cheveux dorés, aux yeux
d'azur, au rouge corsage, rappelaient en tous points leurs accortes ancêtres
de la celtique Armoricaine. Le temps était beau, l'air était embaumé
par de tièdes zéphyrs, le soleil, depuis trois heures, s'inclinait vers
le couchant. Alors, quelques-unes de ces bachelettes devisaient bruyamment
pendant que d'autres regardaient luire la hallebarde de la sentinelle en
faction de ce côté du château, ou écoutaient le bruit de ses pas, répercutés
par l'écho du rivage. Au milieu de propos où éclataient rires fréquents,
elles avisèrent un petit bateau qui s'avançait vers le lavoir. Le
regardant avec curiosité, les lavandières aperçurent, déposée dans la
barque, une croix signe de la Rédemption. Quelque peu interdites elles se
signèrent avec respect. N'était-ce point un avis que le Sauveur voulait
leur donner, une occasion de revenir à lui ? Mais les bachelettes étaient
jeunes, légères peut-être, elles résolurent d'ajourner les réflexions
sérieuses. Pendant ce temps, la barque tournoyant dans le lit de la rivière,
vint plusieurs fois près les lavandières. Enfin, n'ayant point été
retenue, d'autres disent même qu'ayant été repoussée, une voix se fit
entendre, annonçant qu'à partir de ce moment Rieux diminuerait chaque
jour d'un denier et que Redon s'en augmenterait. L'esquif béni conduit
par le courant et le vent qui fraîchit alors, remonta la Vilaine,
laissant après lui une voie blanche, trace indélébile de son passage.
Accueilli religieusement par les Bénédictins de Redon, le Christ qui été
recouvert d'argent fut processionnellement porté à l'église et placé
sur le grand autel, non loin du coffre précieux où était, dit-on,
renfermé avec les reliques de Saint apothème, une plume tombée de
l'aile de l'archange St-Gabriel lorsqu'il fit la salutation angélique,
une goutte du lait de la Sainte Vierge, un han laborieux de l'atelier de
St-Joseph. Le bateau eut aussi pour abri l'église de St-Sauveur et fut
placé sous l'orgue près du portail à l'entrée principale, ou il est
resté suspendu jusqu'à l'incendie de la magnifique nef de l'église,
incendie terrible qui dura huit jours, arrivé en 1787 la veille de la
Pentecôte. Les châtelains de Rieux, si hospitaliers, toujours généreux,
firent des fondations pieuses pour apaiser le Sauveur si mal reçu dans
leurs domaines. Outre la cure et le prieuré de la ville féodale, et de
nombreuses chapelles, ils en firent construire une fort belle pour accroître
à l'est, l'église des bénédictins de Redon, et fondèrent à la porte
même du château de Rieux un magnifique couvent. Malgré ces pieux
efforts, on remarque que depuis l'époque où le Christ fut repoussé par
les lavandières, Redon s'est accru du denier dont Rieux a diminué tous
les jours. L'agrandissement de l'un, l'appauvrissement de l'autre perpétue
cette tradition que d'ailleurs la voie blanche qui paraît à la haute mer
ne saurait faire oublier."
Ce
qui est historique c’est que Redon fut fondé en 834 par St-Conwoïon et
autour du monastère, une ville s’établit et prospéra, car les
conditions géographiques y étaient plus favorables qu’à Rieux et que
cette localité alla dès lors en déclinant. La destruction du Pont de
Rieux permit aussi le passage des bateaux plus conséquents vers Redon.
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